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EN BREF N°538 : Programmer le pire pour la décennie à venir : la loi de programmation de la recherche scelle la déconstruction du service public de l’ESR

jeudi 12 novembre 2020

Programmer le pire pour la décennie à venir : la loi de programmation de la recherche scelle la déconstruction du service public de l’ESR

Le 9 novembre 2020, la commission mixte paritaire, composée de parlementaires de l’Assemblée nationale et du Sénat, a stabilisé le texte de la future Loi de programmation de la recherche (LPR), en lui donnant le contenu le plus régressif possible. La loi ne pourra être modifiée et sera votée très prochainement par les deux assemblées. Dans la continuité des politiques qui ont assujetti l’ESR public aux idéologies et intérêts capitalistes depuis plus de deux décennies, la LPR est une touche de plus subordonnant la recherche libre et indépendante à la start-up nation et à l’« innovation » génératrice de profits dans une France désindustrialisée.

Rien n’y a fait : organisations syndicales, sociétés savantes, instances scientifiques (CoNRS, CNU), collectifs et groupes divers (RogueESR, Academia, Université ouverte, Groupe Jean-Pierre Vernant etc.) ont élevé leur voix refusant cette loi scélérate ; des parlementaires ont dénoncé « une loi de programmation budgétaire sans budget » ; le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a rejeté « un remède pire que le mal » ; tout cela a été balayé d’un trait par la ministre et la cohorte de féodaux (Conférence des Présidents d’Universités [CPU], directions d’organismes de recherche) à qui la LPR ouvre la voie rêvée de contournement de la collégialité, de la démocratie scientifique et universitaire, du statut des personnels, de la liberté de revendiquer.

Certes, les libertés académiques ne seront pas subordonnées « aux valeurs de la République » (sic), mais cela frôlait l’inconstitutionnalité. Par contre, la liberté d’exprimer son désaccord et de manifester dans les enceintes universitaires et de recherche seront désormais « un trouble à la tranquillité » et au « bon ordre » passibles de 3 ans d’emprisonnement et jusqu’à 42 000€ d’amende pour ce « délit en réunion ». Faire taire toute opposition instaurera un climat de soumission. Une ESR aux ordres.

Cet amendement liberticide de la loi concerne tous les regroupements de l’enseignement supérieur et de recherche en cours de constitution. Sont donc concernés l’ensemble des personnels travaillant dans le périmètre de ces regroupements : étudiants, salariés des universités, des organismes nationaux de recherche, des écoles d’ingénieurs et autres institutions ou entreprises présentes sur le site. Les franchises universitaires deviennent, de fait, obsolètes. Les forces de l’ordre pourront intervenir avec ou sans l’assentiment du président de l’établissement et les procureurs pourront engager immédiatement des poursuites sous prétexte de flagrant délit.

La précarité à tous les étages et le contournement des instances collégiales tel le CNU (Conseil national des universités), garant du cadre national des recrutements universitaires, sont au cœur de la LPR. Précarité « de luxe » via les « chaires junior » dont les heureux élus, travaillant sur des « sujets porteurs », auront des moyens financiers pour embaucher d’autres précaires et exploiter leur travail, quand le financement pérenne le plus basique manque cruellement aux laboratoires et aux équipes ; et précarité « de bas étage », via les « CDI de mission scientifique » dont la durée est subordonnée à celle des projets à la fin incertaine. Casse du statut de fonctionnaire qui garantit l’indépendance, prémunit contre les pressions de tous ordres et met le personnel de l’ESR au service de l’intérêt public.

Tout a déjà été dit contre l’aberration du financement sur projet qui constituera la nouvelle norme, car la LPR prétend augmenter le budget de l’ANR (Agence nationale de la recherche) au détriment de celui des laboratoires. La pandémie COVID19 a grandement démontré l’inanité – et même la dangerosité – d’un tel financement de la recherche qui favorise « les modes » au détriment de la véritable prise de risque et de l’originalité.

Ces « modèles » de recrutement et de financement ont fait faillite là où ils sont la règle, notamment dans le monde anglo-saxon, où l’on voit aujourd’hui leurs effets délétères : la crise COVID mène à la baisse des ressources des établissements qui licencient massivement les personnels, obérant ainsi l’avenir des jeunes et stoppant le développement de la science, dont la pandémie a démontré le rôle vital pour l’humanité.

Les atteintes aux libertés ne concernent pas que l’Enseignement supérieur et la recherche. Il est dans le prolongement de l’autoritarisme du pouvoir politique actuel qui oppose la violence policière aux manifestations de contestation, aussi bien syndicales que par exemple celles des Gilets Jaunes. La préoccupation du gouvernement est d’empêcher toute convergence contre sa politique.

Nous ne sommes ni résignés, ni abattus. Nous sommes en colère. La mobilisation doit se poursuivre, prendre des formes nouvelles, toucher le plus de collègues possible, essaimer au-delà même de notre communauté. La CP-CNU (Commission permanente du CNU) remet en cause la légitimité de la ministre. D’autres prônent la « refondation » de l’Université et de la Recherche. Toutes les actions, y compris numériques, doivent maintenant s’intensifier.

Le SNTRS-CGT appelle les collègues à refuser de courber l’échine, à s’organiser et à riposter collectivement et massivement. Il appelle les collègues à se réunir en assemblées générales, en présentiel quand c’est possible ou par visioconférence, pour discuter et porter nos revendications pour un ESR libre et ouvert à tous. L’ESR ne tient que grâce à nous, à notre haut sens des responsabilités, à notre dévouement à la production et la diffusion du savoir, à la formation des générations à venir.

Les seules luttes perdues d’avance sont celles qu’on ne mène pas.

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En Bref N°538
du 12 novembre 2020

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