Du temps, de l’argent et de l’indépendance

vendredi 12 février 2021

Article paru dans le journal "l’Humanité" Lundi 8 février 2021

Du temps, de l’argent et de l’indépendance

Faisons un retour historique depuis les années 2000.

La problématique de l’étude de la famille des coronavirus a été abordée avec l’épidémie de SARS-CoV-1 en 2003. Les États cessent de s’y intéresser à partir de 2008 : l’épidémie disparaît, les budgets des recherches se tarissent. En 2012, regain d’intérêt car un nouveau coronavirus, le MERS-CoV, passe du dromadaire à l’humain. Des budgets sont débloqués, mais uniquement entre 2012 et 2014.
Les spécialistes connaissaient les risques de développement d’une pandémie liée aux coronavirus. Mais une fois les risques écartés, leurs demandes de budget auprès de l’agence nationale de la recherche n’ont pas été entendues. Les financements réguliers devenus ridicules, les chercheurs ne peuvent compter que sur les appels à projet où la sélection est féroce et souvent orientée selon les enjeux du moment.
L’histoire montre que, pour lutter contre les pandémies, la recherche doit intervenir bien en amont des crises sanitaires.
Depuis plus de vingt ans, la baisse des financements des organismes de recherche a entraîné une baisse drastique tant des dotations de base des laboratoires, que des recrutements : en 2007, le CNRS recrutait 1000 chercheurs, ingénieurs et techniciens statutaires ; en 2021, il n’en recrutera plus que 560.

Pour avancer, la recherche a besoin de financements récurrents, de temps et de liberté, hors modes et urgences. Le statut de fonctionnaire des chercheurs français leur donne la liberté et l’indépendance indispensables, mais sans budget cette liberté se réduit à néant.
Soutenir la recherche fondamentale est la condition sine qua non pour préparer aux épidémies à venir. Dans l’urgence d’une seule année, des vaccins ont été mis au point grâce à la coopération entre les scientifiques du monde entier et à des financements conséquents. La vaccination est essentielle. Mais contrairement à un vaccin agissant sur des coronavirus connus d’avance, un médicament s’attaquera même à ceux à venir. Or il faudra des années pour développer de nouveaux médicaments efficaces. L’apport de la recherche fondamentale est ici capital.
Les grands groupes pharmaceutiques trouvant la recherche et le développement (R&D) pas assez rentables, les liquident sans scrupules. Sanofi licencie 364 personnes en France tout en continuant à verser des dividendes à ses actionnaires et à percevoir, depuis plus de 10 ans, 130 millions € par an en crédit impôt recherche. Celui-ci représente 6,5 Milliards de dépense pour les finances publiques en 2019 qui échappent à la recherche publique. Une preuve éclatante de l’inefficacité de ces aides publiques versées aux groupes privés sans évaluation ni contrepartie.
Le gouvernement, via la loi de programmation de la recherche, voudrait mettre les scientifiques à disposition de la R&D des entreprises et réorienter la recherche publique vers l’innovation, pour permettre au privé de « récupérer » les découvertes : socialiser les risques, privatiser les bénéfices.

Cette loi propose précarité et budgets conditionnés aux appels à projet. Pour faire face aux risques de pandémie il faut tout le contraire : redonner à la recherche publique les moyens humains et matériels pour travailler sur le temps long.

Josiane Tack
Secrétaire générale du Syndicat national des travailleurs de la recherche scientifique (SNTRS-CGT)
Dina Bacalexi
Responsable secteur international du SNTRS-CGT

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