Communiqué du SNTRS-CGT sur le statut « CNRS KeyLabs »
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Communiqué du SNTRS-CGT sur le statut « CNRS KeyLabs »
Notre communauté a découvert brutalement la création d’un label d’unité « CNRS Key Labs » lors de la conférence des Directeurs d’unités le 12 décembre 2024. Ce label est un choix assumé par la direction générale du CNRS. La direction du CNRS justifie de « mettre en cohérence la politique du CNRS avec celle de ses moyens ».
Les Key Labs(KL) : le mauvais outil
Le statut de « CNRS Key Lab » ne sera attribué qu’à 26% des unités qui seront « mieux mises en valeur et mieux accompagnées » que les autres unités. Les critères qui prévalent à ce statut ne relèvent pas nécessairement d’une évaluation scientifique. C’est probablement pour cette raison que le Conseil Scientifique comme l’ensemble du Comité National de la Recherche scientifique (les CSIs et les sections) n’ont pas été associés ni même consultés sur ce concept.
Le choix et les critères sont avant tout mercantiles et idéologiques. Ils nient l’importance de la recherche dans tous les domaines de la connaissance. Ils auront notamment des conséquences dévastatrices et rapides dans les unités de petites tailles ou celles où le CNRS aura laissé les effectifs péricliter. Ce sera la double peine pour elles, car les postes IT seront attribués préférentiellement. Ce dispositif va générer un biais d’attractivité pour les jeunes candidat.es dont l’intérêt sera de privilégier les KL en raison de l’environnement de travail, et incitera fortement à des mobilités internes.
Les Key Labs changeront nos métiers
Ce dispositif sera structurant et compromet les missions fondamentales du CNRS. En l’état, l’établissement renonce à couvrir largement les disciplines et à participer au développement du front continu des connaissances. Il renonce aussi à son caractère national avec un repli sur une minorité ciblée d’unités. Il constitue un élément supplémentaire d’opposition et de compétition accrue des chercheurs entre eux. Alors que la compétition internationale est déjà rude, créer ce différentiel au sein même de nos établissements nous semble absurde et sera terriblement improductif pour l’ESR français.
Pour les personnels ingénieurs et techniciens, ce projet est particulièrement dangereux. La description faite des KL indique qu’ils ont vocation à accueillir toutes les plateformes technologiques et de services, même si l’accès à ces plateformes restera possible pour l’ensemble de la communauté scientifique. Nous connaissons déjà les conséquences de ce genre de restructurations. Ces choix d’organisation du travail modifient considérablement nos métiers. Les personnels ingénieurs et techniciens ne serons plus impliqués dans le développement des connaissances et des savoir-faire, et leurs activités seront réduites à une suite de prestations décorrélées des objectifs et des contextes expérimentaux. Il s’agirait alors d’une organisation de la prestation « au ticket » comme aux rayons boucheries des hypermarchés. Cela souligne un mépris et une méconnaissance du rôle réel des IT dans les unités et dans leurs contributions à la recherche.
Nous faisons le constat que le label « CNRS Key Labs » est un mauvais outil pour répondre à un vrai problème, celui du manque de moyen.
La véritable question : les moyens
Plutôt que de dénoncer les manques de moyens budgétaires et d’emplois, nous regrettons que la direction générale du CNRS ait fait le choix de l’austérité pilotée par la politique de E. Macron.
En extrapolant les justifications de notre PDG, A. Petit, à savoir un repli du CNRS sur un quart de ses unités, nous entendons que l’établissement aurait besoin d’une augmentation de 3 à 4 fois plus de moyens pour maintenir ses unités et son potentiel de recherche.
Plutôt que de proposer un plan social, nous vous proposons d’œuvrer pour justifier les moyens suffisants pour le maintien de nos unités.
La politique budgétaire en cause
Aujourd’hui, nous voyons bien que ce sont l’ensemble des opérateurs de l’Etat qui sont menacés, et ce, sans discussion de fond sur leurs rôles, leurs missions ni leurs importances. Tout comme le CNRS, d’autres « opérateurs de l’Etat » sont menacés.
L’ADEME, agence indispensable à la protection de l’environnement et qui accompagne efficacement les établissements et les administrations à préserver l’environnement et à construire un avenir plus responsable, se trouve, comme le CNRS, menacé. Il en va de même pour l’Office National de la Biodiversité. Comment peut-on sacrifier ainsi les structures clées dans la gestion et l’accompagnement du monde d’après le capitalisme ? A moins, justement, que la France anticipe le « trumpisme » dans une escalade dans le déni climatique et environnemental. Ces questions sont la clé de notre avenir. Qu’ils soient sociétaux, économiques ou climatiques, les enjeux auxquels nos sociétés vont devoir se confronter ne peuvent trouver de salut sans une recherche fondamentale en état de marche, en capacité d’étudier et de proposer de nouvelles solutions.
Il n’y a pas de véritable crise budgétaire en France. Il y a des choix de gestion qui nous sont opposés et maquillés en « crise ».
La situation économique de la France ne s’est pas dégradée ainsi soudainement. Elle est le fait de choix budgétaires qui favorisent les cadeaux fiscaux aux très grandes entreprises, alors que les groupes du CAC40 ont versé un montant record en 2024 à leurs actionnaires. Le rapport de la Cour des comptes de 2023 sur les dépenses fiscales indique que l’Etat n’a réellement perçu que 12,4 % de l’impôt sur les sociétés. La réalité est que la France est devenue un paradis fiscal pour les grands groupes. Il n’y a donc pas de crise budgétaire, mais des choix de gestion qui favorisent honteusement le capital. Le Crédit Impôt Recherche (CIR) en est un exemple.
E. Macron préfère sacrifier le CNRS plutôt que renoncer aux 7,7 milliards d’€ de CIR.
Nous devons refuser cette politique. La violence de cette mesure doit nous obliger à répondre en posant les véritables questions. Nous devons aussi avoir conscience que cette brutalité n’est pas complètement étrangère aux positions agressives et cupides de certains universitaires à l’encontre du CNRS. Nous devons réaffirmer l’importance du rôle du CNRS et par conséquent, celle de ses moyens !
Pour obtenir les moyens nécessaires à nos missions
Le SNTRS-CGT, avec l’ensemble des syndicats du CNRS, appelle les personnels de la région parisienne à se mobiliser devant le siège du CNRS le jour de son Conseil Scientifique,le 27 janvier à 12h30,pour signifier notre opposition à ce label « CNRS Key Lab »
Et, en délégations régionales, faites adopter des motions et adressez-les-nous
Pour dire non aux Key Labs et défendre nos unités, nos emplois et nos budgets !