Rapport à la CE du 20 décembre 2018

lundi 1er avril 2019

Rapport à la CE du 20 décembre 2018

Par François Bonnarel

Situation internationale
Le monde dans lequel nous vivons est marqué par l’antagonisme grandissant entre le capital et les peuples. La rapacité du premier n’a d’égal que les souffrances des seconds.
Comme on le sait, le capital est prêt à tuer pour le taux de profit. La guerre sans fin dans laquelle est plongée le Proche-Orient depuis 100 ans connaît peut-être une pause en Syrie ou au Yémen, mais elle peut exploser à nouveau en Palestine ou contre l’Iran dès demain.
Récemment, la COP24 a montré que non content d’écraser les peuples, le capitalisme ne peut se résoudre à contrôler son usage de la nature pour limiter le réchauffement climatique et ses conséquences pour les générations futures. Comme disait Marx sur un sujet connexe :
« L’esprit même de la production capitaliste, axé sur le profit le plus immédiat, est en contradiction avec l’agriculture, qui doit mener sa production en tenant compte de l’ensemble des conditions d’existence permanentes des générations humaines qui se succèdent. »
Les expériences de gauche, non exemptes de défauts, menée en Amérique Latine pendant les années 2000 sont toutes aujourd’hui au moins en difficulté, sinon battues comme au Brésil, ou horriblement menacées comme au Venezuela. Le Brésil opte même pour un fasciste patenté, nostalgique de la dictature militaire qui a les réformes sociales en ligne de mire, peu après que les États-Unis se soient donnés un dangereux milliardaire comme chef d’état.
En Europe, que la crise ronge depuis si longtemps, à travers le Brexit ou les Orban, Salvini et autres nationalistes comme en Pologne, le populisme de droite plus ou moins fascisant prend le relais ou s’allie aux libéraux-conservateurs et aux sociaux-libéraux en distillant sa xénophobie mortifère. Les réformes du travail à l’œuvre en Hongrie ou en Autriche démontrent au service de qui travaille vraiment cette démagogie nauséabonde.

En France la bourgeoisie...
Alors en France les choses ont été légèrement différentes, la bourgeoisie a imposé un autre moyen d’arriver à ses fins, car l’inclassable Macron qui se dit « progressiste » a réussi son holdup sur l’état français. Son objectif : liquider ce qui reste de l’organisation sociale progressiste issue notamment du programme du CNR. C’est la "révolution" dont Macron avait fait son livre programme. Détaillons un peu ce qu’il a fait et ce qu’il veut faire :
— -> Très tôt il complète la réforme du droit du travail avec les ordonnances de Pénicaud. Elles achèvent ce que la loi El Khomri n’avait pas pu réaliser. Fort de sa soi-disant légitimité et de la résignation et du scepticisme des salariés, il inflige sa première défaite au mouvement syndical et principalement à la CGT. Les ordonnances Pénicaud c’est la CSE qui remplacera partout fin 2019 CE, CHSCT et délégués du personnel. Dès septembre 2018 il aura déjà réduit le nombre d’élus du personnel pour les salariés d’un tiers. Il généralise le CDI de chantier et plafonne les indemnités de licenciement, et je ne détaille pas tout.


> Le gouvernement s’est ensuite attaqué à l’entrée dans les universités et à une réforme du lycée et du bac, en organisant via ParcourSup un savant système d’aiguillage qui en décourageant les jeunes des milieux le plus populaires a « réglé le problème » des effectifs croissants.
Les difficultés du système antérieur déjà lourdement marqué par la sélection sociale et les échecs en premier cycle supérieur qui n’en faisaient pas un modèle, n’ont pas permis à un puissant mouvement pour l’accès aux études de se développer au printemps 2018 malgré la détermination d’un certain nombre d’étudiants en lutte.


> Presque en parallèle, le gouvernement impose une réforme de la SNCF qui casse le statut pour les futurs cheminots et prépare ainsi la mise en concurrence et ensuite la privatisation du rail. Malgré une longue grève par intermittence, les cheminots, dont la lutte n’a pas vraiment convergé avec celle d’autres secteurs, sont en grande partie défaits.


> C’est dès l’automne 2017 qu’il entame son chantier quinquennal pour la Destruction de la fonction publique "Action publique 2022" avec les réductions de mission, les privatisations, les externalisations et le nouveau contrat social avec les agents publics. Là encore on trouve une accentuation des projets de salaires au mérite, le recours facilité aux CDD avec la mise en place d’un CDI de projet calqué sur celui du privé, les incitations plus ou moins policées à partir vers le privé et la non reconduction des départs pour supprimer 120000 emplois dans la FP.
— > Les "concertations" concernant la réforme des retraites avec JP Delevoye ont commencé au printemps. Peu à peu le projet du « tout euro cotisé donnera les mêmes droits à tous » se dévoile. En réalité le système par point individualise les prestations. Les pensions ne sont pas prises en proportion des richesses créés par les actifs à un moment donné, mais dépendent étroitement de ce que chacun a cotisé malgré les vicissitudes de sa carrière et sont désindexées du coût de la vie.
La réforme serait aussi un élément essentiel de la destruction du statut de fonctionnaire.
— -> Le gouvernement fait pressions sur les partenaires sociaux pour que le coût de l’assurance chômage soit réduite de plus de 3 milliards d’euros. Particulièrement visés les intermittents du spectacle, mais pas seulement. Si les partenaires sociaux ne se mettent pas d’accord le gouvernement légiférera pour imposer cette réduction du coût et des droits des chômeurs.


> Autre exemple passé peut être inaperçu : Pour la formation professionnelle le gouvernement Philippe achève les dégâts de la marchandisation en organisant un plan social à l’AFPA, avec 1541 suppressions d’emplois et la fermeture de 38 centres FPA. L’AFPA a subi successivement depuis dix ans la régionalisation du financement a été récemment transformé en EPIC, mettant fin au paritarisme créé par les gouvernements de la libération et notamment Ambroise Croizat. Le 6 décembre dernier un tiers des 9000 agents de l’AFPA a manifesté à Paris pour exiger du ministère du travail l’arrêt de ce plan.
–-> Plus près de nous il cherche également à réformer la formation des maîtres en l’éloignant des universités et de la recherche et en la rapprochant des académies. la mise en responsabilité des apprentis enseignants est avancée, au détriment de la formation
— -> Dans le supérieur et la recherche, outre ParcourSup déjà évoqué, on assiste à une volonté d’accélérer la concentration et la caporalisation des sites via un projet d’ordonnance/brûlot qui prévoit la mise en place d’établissements expérimentaux pour dix ans auxquels tous les établissements membres, y compris les EPST devront se soumettre.
Le processus d’augmentation des droits d’inscriptions est entamé avec les hausses faramineuses que devront subir les étudiants extracommunautaires.
La crise de l’emploi statutaire dans l’ESR se poursuit pilotée par les restrictions budgétaires du gouvernement avec la complicité proactive de certains responsables d’établissement, notamment Antoine Petit au CNRS qui impose la réduction de 50 recrutements de chercheurs sur 300 au CA du 13 décembre dernier, malgré les pétitions et le rassemblement organisé à Michel Ange par l’intersyndicale sur initiative SNTRS.
La crise du recrutement est également notable dans plusieurs universités, comme à Lille, qui n’a publié aucun poste d’enseignant-chercheur pour 2019, faute de masse salariale suffisante ou à Rennes I qui va supprimer 82 emplois sur 3 ans pour retrouver un budget "à l’équilibre".
Et dans ce contexte l’annonce récente du non financement du GVT 2019 dans les universités (rappelons que ce non financement était déjà à l’œuvre dans les EPST qui ont dû « pomper » massivement dans les fonds de roulement pour payer leurs fonctionnaires) fait l’effet d’une bombe qui a motivé le boycott du CNESER par les organisations syndicales lundi dernier (17/12/2018).

La réponse des salariés et du peuple français
Face à cette avalanche de contre-réformes réactionnaires, face à cet autoritarisme sans précédent, le mouvement syndical a subi de nombreux reculs malgré une volonté que j’estime indéniable de certains salariés, au premier rang desquels la CGT de résister à ces mauvais coups.
Après tous ces revers du mouvement social, la colère du peuple est venue d’où on ne l’attendait pas, comme souvent.
Le mouvement des gilets jaunes a démarré autour du refus d’une taxe supplémentaire sur le carburant, touchant principalement ceux qui utilisent leur voiture quotidiennement pour travailler. Pour certains, plutôt petits patrons souvent, d’autres taxes, impôts et cotisations étaient aussi en ligne de mire. Normal vu le caractère hétéroclite du mouvement qui ne partait pas du rapport capital/travail à l’entreprise, mais des conditions de vie. Parfois des positionnements franchement extrême-droitiers ont eu lieu.
Mais rapidement, cependant les revendications d’augmentation du SMIC, de rétablissement de l’ISF, voire de justice fiscale ou de remise en cause du caractère antidémocratique des institutions actuelles se sont fait de plus en plus entendre sur les ronds-points. Des revendications qui fondamentalement vont dans le bon sens et apparaissaient dès fin novembre.
Dès ce moment la CGT a tenté de réaliser des convergences voir des manifs communes, notamment dans les grandes villes de province. A Paris les choses ont rapidement pris un autre cours avec la succession des 4 samedis où les affrontements, la casse et la répression policière se sont amplifiés.
Sans doute initiée par des « black block » d’ultra gauche et des groupuscules identitaires et factieux d’ultra-droite la violence a entraîné dans son sillage nombre de citoyens non préparés à cela mais qui se sentaient à bout, face à la surdité macronienne.
Mais même à l’échelle nationale la convergence entre syndicats, notamment la CGT et le mouvement s’est faite difficilement ou pas faite, pour une grande part à cause de la réticence ou de l’hostilité des gilets jaunes eux-mêmes.
Si le pouvoir a dû bouger sur certains points ; notamment la taxe ou la CSG pour les retraités touchant moins de 2000 euros par mois, son augmentation de la rémunération des smicards par la prime d’activité apparait aujourd’hui essentiellement comme une arnaque et la défiscalisation des heures supplémentaires sera payé par les contribuables essentiellement des salariés, quand à l’exonération de cotisation elle plombera un peu plus la sécu.

La CGT et les salariés
Alors la messe est-elle dite aujourd’hui ? Le syndicalisme CGT a-t-il raté le coche ? Je ne le pense pas personnellement, tant la multiplicité des chantiers en cours nécessitera la participation des salariés du public et du privé à la bataille. J’y reviendrai.
A noter que novembre/décembre 2018 n’est pas mai/juin 68. Si la répression du mouvement étudiant de mai avait déclenché la plus grande grève ouvrière que la France ait jamais connue obtenant par conséquent des avancées pour les salariés du niveau de celles de 1936, le mouvement de 2018, ne s’est pas étendu à l’intérieur des entreprises et laisse pour l’instant le MEDEF relativement tranquille, car la production et donc le profit n’est pour l’essentiel pas perturbé.

C’est avec tout cet arrière-plan qu’il faut analyser les élections professionnelles.
Rappelons en les grandes lignes : dans l’ensemble des trois fonctions publiques nous restons la première organisation à 21,8% 3 points devant la CFDT (qui recule également un petit peu) malgré notre baisse de 1,3 %, dans un contexte de recul de 3% de la participation qui passe en dessous de 50%.
Dans la fonction publique d’état, nous sommes à 12,1%, toujours 5eme et perdant encore 1,4%.
Au MESR baisse de participation également de 4% cette fois. Si nous progressons légèrement en pourcentage de 0,1% à 18,58 %, nous nous faisons doubler par le SNPTES qui devient la première organisation avec 21,07%. Le SGEN progresse également de 1,25 point et se rapproche de nous à 16,67%
Dans les EPST nous perdons des voix et du pourcentage partout, dans tous les EPST (sauf au CNRS), notamment à l’INSERM où la CFDT nous distance maintenant de plus de 10 points et à l’INRIA où nous nous faisons doubler par le SNCS-FSU. Au CNRS, si dans un contexte de hausse de la participation nous gagnons 194 voix et 0,98% à 23,62% nous nous faisons doubler par la CFDT qui bondit de 5,15 points et de 542 voix. A noter qu’à l’INRA les résultats ne sont pas bons non plus avec une baisse de participation de 14 points et une baisse de la CGT de près de trois points, pour une hausse de près de 5 points du SGEN qui distance maintenant la CGT de 12 points.
Comment analyser ces résultats en demi-teinte, tant globalement que dans notre secteur, et comment analyser notre difficulté à mettre les salariés des entreprises et du secteur public dans l’action contre les mauvais coups macroniens ?
Avons-nous trop cherché à rassembler avec les autres organisations syndicales, et devenant parfois attentiste ? avons-nous mal analysé la nature du mouvement des gilets jaunes en critiquant au départ certaines de ces caractéristiques ? Aurions-nous du plus nettement appeler à la convergence des actions avec ces gilets jaunes ? Sommes-nous détachés des préoccupations quotidiennes des collègues, restant trop sur des problèmes de politique générale ? Pourtant la double difficulté n’est pas générale, il y a des endroits où nous progressons aux élections, il y a des entreprises où des conflits se mènent. J’ai cité l’AFPA, mais on peut penser aux FORD à Blanquefort ou la confédé vient de demander la réquisition de l’entreprise par l’état.
Les camarades pourront donner leur avis dans le débat qui ne manquera pas d’être riche. Je donnerai aussi le mien le moment venu.
Sans parler de situation révolutionnaire ou insurrectionnelle, il y a un décrochage massif de « l’obéissance » des catégories populaires aux dirigeants du pays. Ceci ne concerne pas que les gilets mais l’immense masse des salariés, comme en attestent les sondages. Il faut de l’audace pour faire bouger les choses. Chacun à la CGT, là où il se trouve, doit prendre sa part du combat, occuper sa fenêtre de tir.
Soyons à l’initiative, mais tentons à chaque fois d’entraîner les autres syndicats dans l’action partout où c’est possible.
Le terrain des luttes sera multiple : nous avons parlé de l’emploi dans notre secteur, le combat ne fait que commencer. Il faut poursuivre avec la pétition au CNRS et prévoir une date d’action pour la déposer. Sur ce point Vidal interviewée hier (19/12/2018) sur France Inter se moque du monde en opposant les doctorants ou jeunes chercheurs aux statutaires.
La question salariale, que nous avons labourée avec nos actions sur le RIFSEEP et le PPCR ces dernières années reste centrale. Dans la fonction publique d’état 30% des fonctionnaires touchent moins de 2000 euros nets par mois et la moitié moins de 2260 euros (chiffres de 2013). La lutte contre l’individualisation doit aller de pair avec la lutte contre le déblocage du point d’indice, l’augmentation des primes en attendant une refonte des grilles salariales.
Sans aucun doute nous devons prendre en compte la lutte pour une réforme de la fiscalité : allègement de la TVA sur les produits de première nécessité, refonte plus juste de l’impôt sur le revenu, rétablissement de l’ISF, lutte contre la fraude fiscale et remise en cause du CICE sont au programme avec toute la CGT.
La batailles des retraites n’a pas encore commencé. La "concertation" devrait se poursuivre jusqu’à fin mars ou avril, et la loi serait votée dans la foulée, avant l’été selon les déclarations de Delevoye datant du mois d’Octobre. Pesons pour maintenir et améliorer un vrai système de répartition !
Quant à "action publique 2022 », elle va poursuivre son chemin. Les 4 chantiers pour le nouveau contrat social sont relancés et le projet de loi de réforme de la fonction publique devrait être déposé au début du printemps. Salaires, emploi statutaire, dégraissage et représentation du personnel sont les 4 mots d’ordre qu’il faut rendre populaires.
Notre combat contre la remise en cause des attributions des CAP le la fusion CHSCT/CT, doit être revu à la lueur de l’aspiration démocratique qui s’exprime dans le mouvement de novembre/décembre. Comment faire que salariés et usagers soient plus consultés sur l’avenir du service public au lieu des décisions unilatérales du gouvernement et de son gouvernement ?
Comment s’y prendre pour développer tous ces fronts sans attendre les journées d’action, de l’UFSE mi-janvier ou de la confédé ? Ces journées prendraient tout leur sens si elles venaient fédérer un mouvement multiforme dans les différents secteurs. Là aussi je pense que les camarades auront des idées à développer.


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REFUSONS cette injustice !

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ignez et faite signer la pétition en ligne : http://www.sntrs-cgt.cgt.fr/phpPetitions/index.php?petition=5